Bivouac Sauliac-sur-Célé (46)

26 Septembre 2011 



Et la nuit tomba...

Depuis Cabrerets, la départementale 41 suit le Célé et ses méandres. De part et d'autres des pechs et des falaises abruptes aux sommets illuminés par les rayons rasants d'un soleil de fin d'après-midi et de fin septembre.
Nous roulons en silence, buvant la lumière du jour qui part, le soleil qui joue entre les branches, le calme de l'eau.

Au bord du Célé profitant d'un début d'élargissement de la vallée, le damier coloré des champs cultivés se dessine.
Nous approchons de Sauliac-sur-Célé.
A la sortie du village nous nous engageons sur le petit pont, franchissons la rivière et prenons pied sur la rive gauche du Célé et abordons ainsi une petite route. Des hommes en casquettes et treillis qui discutent près des bacs de tri sélectif, s'arrêtent pour regarder notre Kangoo et la petite caravane qu'il tracte. Où pouvons-nous bien aller en cet étrange attelage et sur cette route à cette heure du jour ? Nous les sentons dubitatifs... Et rions intérieurement.

Mais Luc a sa petite idée de l'endroit où nous allons passer la nuit : il a une carte IGN au 1/25 000ème !
La route se love dans une combe puis la quitte pour s'enlacer autour du Pech.
Le goudron fait place à la terre que la pluie a ravinés par endroit. 
Luc roule doucement et Pucky Pooka suit sans rechigner.
De cahots en nids de poule, cahin-caha l'attelage grimpe jusqu'au sommet du pech, en direction du pylône de télécommunication fiché sur la crête.
Nous irons jeter un oeil, mais l'endroit, surchargé d'ondes et de vrombissements de ventilateurs ne nous inspire pas du tout.

Ce sera plus loin ! 

Au bout de quelques centaines de mètres de chemin de terre, s'offre alors à nous, l'espace plat, entouré de buissons où nous savons que la nuit nous accueillera avec paix et douceur.

Le soleil baisse et les derniers rayons saupoudrent de vert tendre et éclatant les arbustes qui nous entourent.

 Pendant que Luc sort la table, je vais, avec une jubilation non dissimulée de gosse, dans "ma" cuisine, jouer à la dinette...

Le petit salon cosy et les deux banquettes se teintent de paille comme un vin blanc doux. Tout est en place pour la soirée.
La salade laotienne achetée sur un petit marché fermier local, à base de pousses de mungo fraîches, annonce un repas de presque fête...

Les pipistrelles entament leur ballet nocturne. Quelques-unes 

s'approchent de près de notre camp, et par à coups rapides et précis définissent notre présence dans leur représentation ultrasonore d'un espace qui nous est étranger. 

Nous avons conscience d'être les invités d'une nuit dans ce cercle d'herbes rases et grises et sentons des regards scrutateurs et inquiets dans les fourrés obscurs et les masses sombres du feuillage des branches.

Nous parlons à voix basse, pour ne pas déranger les êtres et choses de la nuit.



Lorsque nous lavons nos assiettes, à la lueur rousse et dansante d'une bougie, le vol feutré et floconneux d'une chouette hulotte frôle le "champignon" relevé de Pucky, que nous laissons ainsi, toute ouverte aux bruits et senteurs du crépuscule pour une balade à pied, et à deux, le long du chemin...


Nous revenons à la nuit noire, entrons dans le cocon de notre abri roulant, et allumons la grosse lanterne verte à dynamo que nous avons achetée avant de partir. 


Au loin, des aboiements lancinants et répétitifs de chiens, comme toutes les nuits dans nos campagnes. Personne, étrangement, ni ici ni ailleurs, ne se soucie de les faire cesser, comme s'ils appartenaient définitivement au monde de la nuit et que la peur atavique du grand "fait noir" du dehors gardait les gens dans la sécurité du dedans. 

Nous entamons notre veillée tranquille. Discussion, jeu de cartes, de dés, une infusion avant d'installer le lit.... un dernier tour dehors, derrière les buissons, le dos tourné vers le velours sombre de la nuit. 
Des petits bruits de pattes ou d'ailes, le crissement hésitant et usé d'un vieux criquet presque endormi. 
Et ce parfum sec des lichens vert-de-gris écrasés sous mes pieds, celui plus épicé d'une touffe d'origan craquante, d'un vieux roux passé, que je froisse dans mes mains avec quelques grains gris d'une lavande sauvage...
Il fait si doux !


Nous nous lavons les dents, rangeons le jerrican d'eau sous les flancs de Pucky et refermons la porte.
La nuit nous entoure complètement.
  
Il est temps de dormir.

Dans la vallée un bruit de moteur tourne et ne cessera de tourner jusqu'au matin, à notre grand étonnement.
Nous comprendrons, une fois le jour du lendemain bien entamé, que c'était une machine à collecter le maïs dans les champs près de la rivière Célé.
Toute la nuit, un homme, ou une femme, a tourné, à la lumière des phares, dans des champs interminables, pour récolter les grains et les souffler dans une benne qui suit patiemment derrière.
On est si loin des chars à bœufs ou à vaches, lents et lourds, que j'ai connus dans mon enfance en Gevaudan.

à suivre

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